QUAND LA PUB TUE LES UNES

J'ai beau travailler dans le milieu de la pub, cela ne signifie pas pour autant que j'adhère à tout ce qui ce fait. Alors qu'à l'heure actuelle les annonceurs laissent fondre comme neige au soleil leurs investissements "print" pour se diriger de plus en plus vers la communication "online", les diffuseurs, comme les journaux gratuits, doivent trouver d'autres astuces pour attirer le chaland.
Et c'est là le hic principal. Pourquoi ? Parce-qu'ils n'ont pas trouvé de mieux, depuis 4-5 ans, que de proposer aux annonceurs une "fausse couverture" et ça pose un problème...

Perso, et c'est peut-être une "déformation professionnelle", j'ai toujours adoré voir les couvertures. Forcément, une couverture sert à vendre, toujours ! Une accroche principale qui heurte (comme Libé), inventive (comme 20 Minutes), une belle mise en page (magazines de mode et de beauté)... bref, tout pour nous faire sortir notre argent du porte-feuille. De plus, ayant travaillé dans le milieu de la presse (furtivement) et, par le passé, dirigé deux fanzines sur le manga (Mokona et Planète Animé, y'a une dizaine d'années), je peux vous jurer que pondre une bonne couverture "qui fait vendre" n'est pas chose facile. Dans certains bureaux de presse, des "D.A." (Directeurs Artistiques), comme dans le milieu de la pub, sont diligentés en free-lance pour créer la couve, c'est dire !

Mais maintenant, comme le "À Nous Paris" de cette semaine, on a quoi ? Une pub (certes graphiquement réussie) pour du whisky (même si c'est la même depuis 5 ans... mais bon, c'est un autre problème). C'est tout. Comme le 20 Minutes de la semaine dernière où on a eu un jour une pub pour le nouveau rasoir Gilette. Et la "Une" dans tout ça ? Maintenant on va juger un magazine pour sa plus "belle pub" ? C'est complètement délirant et absurde ! Et les D.A. mandatés pour les "unes" vont finir au chômage ? (alors que la pub se porte réellement au plus mal maintenant ?).
La seule bonne idée de mix "intelligent" entre les impératifs financiers (pub) et l'accroche (la "une") a été pour la sortie d'"Angel-a" de Luc Besson. La première page du 20 Minutes était tout simplement en noir et blanc ("niveaux de gris 1 coul", comme ont dit dans le jargon d'imprimerie) avec un bandeau en bas annonçant la sortie du film.

Mis à part cette bonne exception, où allons-nous dans la Presse ? Une pub pour perdre 10 kilos en deux semaines (avec une fausse obèse) en première page du "Elle" ? Une pub ultra-déprimante de lutte contre le SIDA (bien que très utile !) en première page du Têtu ? Une Rolex énorme pour le très beau Citizen K ? La pub est en train de nous interdire de rêver... Finis les belles starlettes de Elle, les apollons irréels de Têtu, les top-models de Citizen K ?
Où allons-nous, je vous le demande.

Comments

[AMG]

c'est déjà le cas: la pub à son droit de regard sur le contenu. enfin explication: l'annonceur qui fait une promotion sur un vol pour l'asi (whatever) va refuser de se trouver à coté d'un article sur une catastrophe... en asie. Ou tout article qui pourrait nuire à son image. alors souvent on arrondis les angles.
il y a aussi l'annonceur (genre sonia rykiel, je sais j'étais da assistant de rykiel N.) qui veut absolument passer dans le premier cahier en recto contre texte, et surtout du texte. C.A.D. que la page à coté du visuel pub ne doit quasi pas avoir d'image pour par faire de l'ombre au visuel de la pub.
et puis il y à toute la pub détourner par le redactionnel: avez vous remarquez que souvent, je vais prendre un exemple comme "EN VILLE", nous avons droit à une chronique dvd for example, tres élogieuse et une ou deux page plus loin, la pub du dvd dont il était question un peu plus tot. remplacer DVD par ce que vous voulez et "EN VILLE" par un gratuit ou n'importe.
Ha la liberté de la presse!
Bonne soirée devant la télé !!!

[Joëlle]

Une alternative intéressante consistait à l'ajout d'un calque publicitaire semi-transparent sur la une.

Libé (et oui encore)et d'autres journaux d'ailleurs pratiquent parfois cette forme de publicité qui me choque moins que la suppression totale de la page de une et surtout que je peux jeter pour profiter pleinement du journal.

Concernant le poids de la pub dans les médias, comme je disais y a peu, ça a tendance à devenir du sponsoring et non plus de la simple publicité.

Et c'est inquiétant parce qu'à terme les annonceurs vont revendiquer autre chose qu'un simple "affichage" c'est à dire ni plus ni moins qu'un droit de regard sur le contenu éditorial ce qu'ils font parfois déjà.

Enfin disons que certaines rédaction pour ne pas "heurter" leurs gros annonceurs se "dispensent" de faire certains types d'articles.

Jo